Vous verrez le Ciel ouvert – XXX
Les entretiens de Charles Journet
L’espérance chrétienne est d’une inconcevable noblesse. Elle ne cherche pas sa propre gloire. Elle n’ambitionne autre chose que l’entrée, l’immersion dans la Gloire infinie qui la débordera de tous côtés. Entre dans la Joie de ton Seigneur, ce sont les mots qu’entendront les serviteurs bons et fidèles, du plus élevé au plus ignoré. C’est Dieu qui creuse en nous, pour le combler, le désir d’une telle rencontre. C’est Lui qui ne veut avoir pour enfants que des créatures assez magnanimes pour ne pouvoir désirer suprêmement que la vision de Sa Gloire, rien de moins.
A Salerne, où il venait fréquemment la nuit prier devant l’autel de saint Nicolas, frère Thomas d’Aquin fut aperçu en extase par le sacristain qui l’observait. Il entendit une voix venant du Crucifix: Tu as bien écrit de Moi, Thomas, quelle récompense veux-tu? Il répondit: Pas d’autre que Vous, Seigneur.
Portés par la toute puissance du secours de Dieu, le Bien que nous devons espérer est le Bien infini, qui remplit en les débordant, le vide de nos coeurs. Tels sont les biens spirituels que nous demandons à Dieu, par exemple dans la seconde partie du Pater. Tels sont aussi les biens temporels dans lesquels notre vie est engagée. Mais ici nos providences demeurent si incertaines, nous savons si mal ce que Dieu veut de nous et quels sont pour nous les vrais chemins, que notre prière devra se faire prudente, et parfois même hésitante et timide. Un émouvant ex-voto de la chapelle de Bourguillon portait en grandes lettres d’or: O Marie, je vous remercie de ne m’avoir pas exaucée.
Charles Journet, Entretiens sur l’espérance / extraits (Parole et Silence, 1998)
image: Chartreuse de la Valsainte, Charmey / Suisse (acustica-godel.ch)