Haïm Korsia
Qui ne se laisserait pas toucher par la souffrance? La réponse à apporter n’est pourtant pas la mort provoquée mais l’accompagnement. On nous fait croire qu’il n’y a aucune arrière-pensée à propos de l’aide à mourir qui va pourtant rapporter beaucoup par les économies qu’elle fera sur la vie des gens. C’est scandaleux. Je suis écœuré et je ne suis pas le seul. Il est donc capital de conserver des principes et de délimiter des frontières infranchissables dont le principe de l’aide à mourir qui ne doit pas exister.
Il ne faut pas parler d’aide à mourir mais d’aide à vivre. Je répète pour que cela soit bien clair: d’aide à vivre! Nous voulons que les gens vivent bien et jusqu’au bout! Notamment avec des antalgiques, des antidouleurs, et, s’il le faut, en recourant à la sédation profonde continue. Il faut ensuite retirer l’idée d’injection de produit létal puisque la sédation profonde continue et irréversible existe. Si quelqu’un est dans une souffrance telle que l’on n’arrive plus à le traiter, il faut l’endormir mais pas le tuer.
Est-ce que vous vous rendez compte que l’on veut demander à la famille d’aider le patient à mourir? Mais comment est-il possible d’aller jusque-là? Quel besoin de recourir à la famille pour poser un tel geste! Connaissent-ils les traumatismes dans une famille deux générations au moins après un suicide? Ils osent demander au père, à la mère, à l’enfant d’injecter la dose mortelle… et s’ils ne peuvent pas, on demande au personnel médical. On maquille un geste de mort donné par un proche en bienfait… J’en suis atterré. Si cela se passe, on risquerait d’avoir des générations dévorées de l’intérieur par le sentiment de culpabilité.
Je demande aux politiques de penser à leurs proches, leur père, leur mère, leur frère, leur sœur. Ces politiques porteront la responsabilité d’avoir orienté le système de santé vers une catastrophe où celui qui me soigne pourra être celui qui me tue.
Haïm Korsia, Celle qui me soigne pourrait un jour me tuer – Entretien / extraits (lefigaro.fr)
image: Haïm Korsia (la-croix.com)