Chemins de traverse – 49 / Andrée Chedid

Andrée Chedid

Né de la terre
Muré dans sa peau
Façonné par ses os
L’homme
Fait de chair et de sang
Enfanté sur tel lopin de sol
Sous telle lampée de ciel
Surgit des océans
Et de l’ombre
Se dresse
Et se façonne
Selon ses marques
Selon le siècle
Selon le lieu

Ayant flotté
Dans la nappe
Marécageuse et tendre
S’étant bercé
Dans cette lagune
Aux tensions troubles
Aux souterraines humeurs
Son corps
D’eau et d’alliages
Aborde enfin
La vie
Séjour hasardeux
A brève
Ou lente dérive

L’homme affleura
Pour ne pas stagner
L’homme émergea
Pour ne pas croupir
L’homme fonça
Vers l’existence
Et ses récifs
Vers l’avenir
Et ses ruses
Vers les semailles
Et les ravages
Pour dénouer l’énigme
Ou simplement
Pour exister

De chutes
En résurrections
D’échecs
En ascension
Forme
Du terreau initial
Imprégné
Des lois de l’univers
Forgeant sa liberté
En-deçà des pièges
S’arrimant à l’étoile
Par-delà les ténèbres
L’homme
Entonna son chant

Né de la terre
Il bouscula les pesanteurs
Tenta l’équilibre
Entre l’histoire
Et l’horizon
Entre l’infime
Et l’infini
Entre le dérisoire
Et le sens
De rêve en rêve
De pas en pas
L’homme s’obstina
Dans la recherche
De l’issue et du noyau.

Andrée Chedid, Né de la terre , dans: Poèmes (coll. Mille et Une pages/Flammarion, 2014)

image: Alberto Giacometti, L’homme qui marche (2.bp.blogspot.com)

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