Pape François
Seigneur, apprends-nous à prier – LVI
Toutes les prières ne sont pas égales, et toutes ne sont pas appropriées: la Bible elle-même atteste du mauvais résultat de nombreuses prières, qui sont repoussées. Parfois, peut-être Dieu n’est-il pas content de nos prières et nous ne nous en apercevons même pas. Dieu regarde les mains de celui qui prie: pour les rendre pures, il ne faut pas les laver, mais il faut plutôt s’abstenir de mauvaises actions. Saint François d’Assise priait de manière radicale: nul homme n’est digne de nommer Ton Nom (Cantique du soleil).
Mais peut-être la reconnaissance la plus émouvante de la pauvreté de nos prières a-t-elle fleuri sur les lèvres de ce centurion romain qui supplia Jésus un jour de guérir son serviteur malade (cf. Mt 8, 5-13). Il se sentait complètement inadapté: il n’était pas juif, c’était un officier de l’armée d’occupation qui était haïe. Mais la préoccupation pour son serviteur lui fait oser, et il dit: Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri. (Mt 8, 8). C’est la phrase que nous répétons nous aussi dans chaque liturgie eucharistique. Dialoguer avec Dieu est une grâce: nous n’en sommes pas dignes, nous n’avons aucun droit à avancer, nous boitons avec chaque parole et chaque pensée… Mais Jésus est la porte qui nous ouvre à ce dialogue avec Dieu. Nous n’aurions jamais eu le courage de croire à un Dieu qui aime l’homme, si nous n’avions pas connu Jésus. La connaissance de Jésus nous a fait comprendre cela, nous a révélé cela. C’est le scandale que nous trouvons inscrit dans la parabole du père miséricordieux, ou dans celle du pasteur qui va à la recherche de la brebis perdue. Nous n’aurions pas pu concevoir des récits de ce genre, pas même les comprendre, si nous n’avions pas rencontré Jésus. Quel Dieu est disposé à mourir pour les hommes? Quel Dieu aime toujours et patiemment, sans avoir la prétention d’être aimé en retour? Quel Dieu accepte le terrible manque de reconnaissance d’un fils qui lui demande son héritage en avance et s’en va de la maison en gaspillant tout?
C’est Jésus qui révèle le cœur de Dieu. Jésus nous raconte ainsi à travers sa vie dans quelle mesure Dieu est Père. Personne n’est Père comme Lui. La paternité qui est proximité, compassion et tendresse. N’oublions pas ces trois mots qui sont le style de Dieu: proximité, compassion et tendresse. C’est la manière d’exprimer Sa paternité avec nous. Nous imaginons avec difficulté et de très loin l’amour dont la Très Sainte Trinité est riche, et quelle immensité de bienveillance réciproque existe entre le Père, le Fils et l’Esprit Saint. Les icônes orientales nous laissent entrevoir quelque chose de ce mystère qui est l’origine et la joie de tout l’univers.
Il nous était surtout impossible de croire que cet amour divin se serait dilaté, en abordant notre rivage humain: nous sommes le terme d’un amour qui n’a pas d’égal sur la terre. Et cela est la grâce de notre foi. Nous ne pouvions vraiment pas espérer de plus haute vocation: l’humanité de Jésus – Dieu s’est fait proche en Jésus – a rendu la vie de la Trinité elle-même disponible pour nous, a ouvert, a ouvert en grand cette porte du mystère de l’amour du Père, du Fils et du Saint-Esprit.
Pape François, Catéchèse: La prière et la Trinité I / extraits (w2.vatican.va)
image: Eglise Sainte Thérèse, Genève / Suisse (2014)